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Les Assises de la mobilité, conclusions et perspectives

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Le 13 décembre, la ministre chargée des transports, Elisabeth Borne, clôturait les Assises de la mobilité, trois mois après leur ouverture en septembre dernier. Retour sur la conclusion de cette vaste concertation ainsi que sur certains éléments qui fondent une des convictions de notre association : la mobilité électrique par batterie est un vecteur primordial de la décarbonation des transports.

Notre association a participé à cette grande consultation, s’adressant à tous les acteurs des territoires et aux usagers, afin de préparer la prochaine « loi d’orientation des mobilités », C’est donc naturellement qu’EdEn était présent à la Porte de la Villette pour assister à la restitution des écrits des groupes de travail – GT -. EdEn a particulièrement apporté sa contribution au groupe de travail « mobilités plus propres », l’un des six GT organisés au plan national, qui marquent la volonté du Gouvernement de privilégier la concertation entre les différentes parties-prenantes.

Néanmoins, les Assises de la mobilité ne se résument pas uniquement à ces six GT ; elles sont aussi :

  • 2 513 contributions sur la plateforme en ligne ;
  • 64 ateliers territoriaux avec 3 200 participants ;
  • 114 ateliers de l’innovation avec 400 contributeurs.

Autant d’événements qui ont permis d’échanger sur les mobilités plus propres, sûres, connectées, soutenables, solidaires, intermodales et de participer à la co-construction de la politique publique sur ces sujets.

En savoir plus sur les recommandations d’EdEn : Assises de la Mobilité – La contribution d’EdEn au gouvernement

Quelles mobilités propres pour demain ?

Après une matinée dédiée à des mini-conférences sur l’innovation, l’après-midi était entièrement tournée vers la restitution des activités menées par les GT. Tour d’abord, c’est Patrick Oliva qui a dévoilé quelques axes forts du rapport de synthèse du GT « mobilités plus propres » qu’il présidait. Concernant ce sujet qui nous tient particulièrement à cœur, EdEn note la bonne tenue de la concertation organisée par les pouvoirs publics, ces derniers ayant appréhendé cette problématique dans sa globalité, en traitant à la fois des mobilités actives – marche, vélo, etc. – et de la question des véhicules propres. En effet, notre association pense qu’il est essentiel de soutenir tous les modes de transport qui favorisent la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Pour ce qui est notre domaine d’expertise – le véhicule propre -, nous avons relevé avec satisfaction que le rapport reprend une grande partie de nos propositions visant à accompagner l’essor du véhicule électrique par batterie. Nos recommandations se retrouvent en particulier dans la section « accélérer le développement de l’électromobilité » aux pages 29 et 30.

Lire aussi : Assises de la Mobilité – Proposition d’initiative : réduire notre empreinte environnementale à travers les autoroutes électrique

La mobilité propre passera par le véhicule électrique par batterie

Au cours de la phase de concertation, notre conviction concernant la mobilité électrique par batterie comme vecteur de la transition énergétique dans les transports a été renforcée par la parution de deux études particulièrement pertinentes à ce sujet que nous vous partageons.

La première nous vient de Belgique et plus précisément de la Vrije Universiteit Brussel et porte sur la réalité des émissions de CO2 du véhicule électrique durant tout son cycle de vie – de la production au recyclage -. Ainsi, même en utilisant en partie de l’électricité produite par du charbon, ce qui n’est pas le cas de la France où celle-ci est presque entièrement décarbonée, un véhicule électrique émet 50 % de gaz à effet de serre de moins que les véhicules diesel.

La seconde a été produite par plusieurs ONG dont la Fondation pour la nature et l’homme, l’European Climate Foundation et Carbone 4, et concerne la place du véhicule électrique dans la transition énergétique française. L’étude a comparé six véhicules berlines et citadines aux motorisations électriques, hybrides et deux véhicules thermiques. Fabrication, usage, système « vehicle-to-grid », recyclage et seconde vie des batteries, les différentes étapes ont été analysées selon cinq catégories d’impact : climat, énergies fossiles, écosystèmes, eaux, air ; qui ont été mises en perspective dans trois scénarios :

  • Scénario 1, ambition transition énergétique (39 % d’EnR) ;
  • Scénario 2, accélération en faveur des énergies renouvelables (vers 100 % d’EnR en 2050) ;
  • Scénario 3, renoncement politique (15 % d’EnR, 19 % fossiles).

Il en ressort que les atouts environnementaux des véhicules électriques pour lutter contre le changement climatique se confirment en 2016 et encore plus en 2030 dans le cas des scénarios 1 et 2.

EdEn ne manquera pas d’être attentif à tout le processus qui mènera à la prochaine « loi d’orientation des mobilités » afin, notamment, que les arbitrages effectués ne perdent pas de vue l’objectif prioritaire : diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports.

En savoir plus : La montée en puissance du véhicule électrique

Trois questions à Jean-Pierre Hauet, président du Comité scientifique, économique, environnement et sociétal et porteur des propositions d’EdEn aux Assises de la mobilité

Pourquoi la mobilité électrique par batteries vous semble-t-elle le meilleur moyen de décarboner le secteur des transports ?

Jean-Pierre Hauet : Ce n’est pas le seul moyen et le secteur des transports est si complexe qu’il ne faut négliger aucune approche, dès lors qu’elle est économiquement et écologiquement fondée. Ainsi la mobilité électrique par hydrogène peut s’avérer comme une bonne solution pour des transports professionnels tels que les chemins de fer, les tramways, les poids lourds, les flottes de taxis, etc.

L’un des atouts du véhicule électrique par batteries est qu’il est accessible au plus grand nombre grâce à l’omniprésence du réseau électrique. Son développement a été bridé pendant des décennies du fait du coût et des performances insuffisantes des batteries. Or celles-ci, essentiellement les batteries Li-ion, ont vu leur prix être divisé par 4 en une dizaine d’années et ce mouvement va se poursuivre. Leurs performances vont continuer à progresser et la plupart des véhicules disposeront prochainement de batteries leur assurant une autonomie de 400 km environ.

Les constructeurs automobiles ont su tirer parti de cette évolution et offrent à présent des modèles attractifs dont le surcoût à l’achat va en décroissant.

J’ajoute que, dans le secteur des poids lourds, la mobilité électrique par batteries, est également une solution qui doit être considérée.

Quelles sont les principales mesures à déployer pour accompagner son développement ?

JPH : Nous voyons quatre types de mesures :

  • il faut que le véhicule électrique soit totalement propre. Ceci implique que l’électricité soit décarbonée, ce qui est déjà le cas en France, mais aussi que le cycle de vie des batteries soit organisé pour assurer de bonnes conditions de fabrication et un recyclage approprié ;
  • la mobilité électrique doit être accessible à tous, ce qui suppose le développement d’infrastructures de recharge appropriées, publiques et privées. Eden recommande en particulier que soit établi un schéma directeur de déploiement de bornes de recharge publiques, reposant sur un séquencement rationnel des puissances, incluant les deux-roues, dont le respect sera un préalable à l’octroi d’un soutien financier des pouvoirs publics. C’est un grand programme que les pouvoirs publics doivent coordonner.

Il faut simultanément lever un certain nombre de goulets d’étranglement qui subsistent dans le secteur privé et dans les copropriétés en particulier.

  • La mobilité électrique doit contribuer à la stabilité des réseaux électriques. Le pilotage de la recharge doit devenir la règle et les technologies d’échange bidirectionnel avec le réseau (le V2G) doivent être encouragées ;
  • Il faut enfin que la mobilité électrique devienne une composante centrale de la conception environnementale des bâtiments et des quartiers. Grâce à leurs capacités de stockage, les véhicules électriques peuvent apporter une contribution positive à la valorisation de l’énergie solaire qui à défaut, risque d’être produite à des moments où l’on n’en aura pas besoin.

En France, on parle souvent du modèle norvégien comme exemple de réussite sur le véhicule électrique. Pensez-vous que la France a la capacité de créer son propre modèle, en s’appuyant notamment sur un secteur automobile national dynamique ?

JPH : Nous avons, comme la Norvège, la chance d’avoir un mix électrique décarboné et c’est un atout qu’il faut préserver. Nous avons un réseau électrique de très grande qualité, tant au niveau du transport que de la distribution. Nous avons également, comme vous le mentionnez, un secteur automobile qui est en première ligne des évolutions technologiques, que ce soit les constructeurs ou les équipementiers.

Mais nous avons des défis à relever. Le premier est lié à la taille du pays qui nous impose de développer des solutions répondant aux besoins de la mobilité quotidienne – descendant jusqu’au vélo ou à la trottinette électriques – comme à ceux des déplacements sur longues distances. C’est un problème d’aménagement du territoire. Le véhicule électrique, utilisé de façon optimale, en covoiturage et en autopartage notamment, peut être un facteur de croissance économique mais aussi de revitalisation des centres villes. Les pouvoirs publics ont un rôle éminent à jouer mais on peut compter sur les constructeurs automobiles pour proposer des solutions innovantes qui évolueront rapidement vers le véhicule autonome et connecté.

Un  autre défi dans lequel la France peut ouvrir la voie est celui du développement coordonné du véhicule électrique et de l’électricité d’origine solaire. On n’a pas encore pris toute la mesure des synergies qui peuvent être développées entre les deux domaines et ces synergies seront un facteur de meilleure acceptabilité des deux technologies.

Mais ne nous leurrons pas, il n’y aura pas de modèle spécifiquement français et le modèle ne peut être qu’européen. Les nouvelles directives en cours d’élaboration à Bruxelles intègrent, mais encore trop timidement, la mutation vers la mobilité électrique.  La France peut être aux avant-postes et  les atouts que j’ai rappelés l’autorisent à faire preuve d’initiative et de volontarisme. C’est un enjeu majeur, énergétique, industriel, environnemental et sociétal.

 

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