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Le verdissement des réseaux de chaleur et de froid : un levier essentiel pour la transition énergétique

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La course vers la décarbonation passe par le développement des réseaux de chaleur et de froid, qui recourent majoritairement aux énergies renouvelables et de récupération locale.

Quelles sont les perspectives de développement des réseaux de chaleur et de froid ?

Sylvie Jéhanno : Les réseaux de chaleur sont une solution en plein développement pour assurer le chauffage et la production d’eau chaude sanitaire à l’échelle d’un quartier ou d’une ville. Les 900 réseaux de chaleur existants en France alimentent 4,5 millions d’équivalents- logements. 680 000 équivalents-logements supplémentaires sont raccordés chaque année. Au total, 10 % des bâtiments d’habitation collectifs et une partie des bâtiments tertiaires sont aujourd’hui raccordés à un réseau de chaleur. Si les réseaux de froid sont en nombre plus limité, avec environ 35 installations en France, ils permettent de répondre de manière écologique aux besoins en rafraîchissement et devraient connaître une forte croissance dans les prochaines années. Dalkia est un acteur majeur avec plus de 300 réseaux de chaleur et de froid en exploitation.

Quelle est la contribution des réseaux de chaleur à la décarbonation des bâtiments ?

S. J. : Les réseaux de chaleur combinent et optimisent différentes sources d’énergies. Ils valorisent les ressources locales et ajustent le sourcing selon la disponibilité des énergies. Chez Dalkia, nous développons des réseaux s’appuyant au maximum sur les énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) des territoires. Sur les réseaux existants, elles remplacent les énergies fossiles. Globalement, notre fédération professionnelle, la FEDENE (Fédération des services énergie environnement), estime que le développement des réseaux de chaleur permet d’éviter plus de 6,63 millions de tonnes de CO2 par an (chiffres FEDENE 2021).

Qu’en est-il du verdissement des réseaux de chaleur ?

S. J. : Sous l’impulsion de la loi de transition énergétique, qui prévoit de multiplier par 5 les quantités d’EnR&R distribuées par les réseaux de chaleur d’ici à 2030, la part de ces énergies a déjà progressé de 30 % en 5 ans. 62,6 % des énergies utilisées pour alimenter les réseaux de chaleur proviennent aujourd’hui des ENR&R (fig. 1). Pour l’avenir, nous attendons beaucoup de la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE3) pour envoyer un signal politique fort et maintenir au-delà de 2030 des objectifs ambitieux tant pour les réseaux de chaleur que pour les réseaux de froid vertueux, piliers indispensables à la lutte contre le réchauffement climatique. Les ambitions de développement des livraisons de chaleur et de froid renouvelables et de récupération ont ainsi été revues à la hausse, conformément à celles fixées par l’Europe qui a revu récemment à 42,5 % la part des ENR dans son mix énergétique en 2030.

Fig. 1 : Évolution des livraisons dans les réseaux de chaleur.
Source : FEDENE (chiffres non corrigés des variations climatiques).

La crise de l’énergie renforce-t-elle le développement des réseaux ?

S. J. : Dans le contexte de crise des prix de l’énergie, les réseaux de chaleur sont un véritable atout économique car ils sont multi-énergies et alimentés en priorité avec les ressources locales. La biomasse locale, la géothermie, la récupération de chaleur fatale protègent des fluctuations des prix des énergies et participent à la lutte contre la précarité énergétique tout en contribuant à notre souveraineté énergétique.

En quoi consiste l’expertise de Dalkia en matière de réseaux de chaleur et de froid ?

S. J. : Filiale du groupe EDF, Dalkia développe depuis plus de 85 ans un fort ancrage territorial, qui facilite au quotidien la concertation et la mise en place de partenariats avec les acteurs locaux, ainsi que la connexion à l’écosystème des startups en région. Dalkia dispose aussi d’une expertise reconnue dans l’ensemble des technologies des énergies renouvelables et de récupération des territoires lui permettant de décarboner la chaleur : bois-énergie, thalassothermie, géothermie, récupération de chaleur, dite fatale, issue des process de l’industrie ou des datacenters. Dalkia dispose aussi d’une forte expertise pour dimensionner les projets, qu’il s’agisse de construire un nouveau réseau ou d’étendre un réseau existant. Ces compétences permettent à Dalkia de proposer des solutions sur mesure et diversifiées, qui vont de la géothermie profonde comme à Évry, à la récupération de chaleur fatale des fours d’aluminium de Constellium pour alimenter le réseau d’Issoire, en passant par la biomasse à Rouen ou encore les calories de la mer pour le réseau de thalassothermie « Massileo » à Marseille. Une fois ces projets mis en place, les DESC (Dalkia Energy Savings Centers), véritables « tours de contrôle » de la performance énergétique des sites, suivent en temps réel les consommations et les optimisent. Avec ces DESC, Dalkia allie des technologies de supervision, de pilotage intelligent des installations et de prévision des consommations. Les solutions les plus avancées, comme les jumeaux numériques des installations, les objets connectés et l’IA sont aussi utilisées, au service de la performance des systèmes. Les réseaux de chaleur deviennent ainsi de plus en plus connectés et « smart », conçus pour optimiser les synergies naturelles entre les capacités de production et les usages énergétiques.

Y a-t-il des freins au développement des réseaux de chaleur ?

S. J. : Le développement des réseaux et leur verdissement impliquent des investissements importants. Des subventions existent : le fonds chaleur de l’ADEME avec un budget de 500 M€ par an constitue un soutien essentiel. La TVA à taux réduit lorsque le réseau de chaleur est à plus de 50 % en ENR&R permet aux bénéficiaires du réseau de disposer d’un prix compétitif et relativement stable dans la durée (moins corrélé aux variations de prix des énergies fossiles). Cependant, la forte fluctuation des prix des énergies, comme celle des matières premières, peut constituer un frein. Les dispositifs actuels pourraient être complétés par la prise en compte de l’impact de l’inflation et des délais d’attribution des subventions : il est nécessaire d’accélérer le temps d’instruction des appels à projets BCIAT car le délai est de 6 à 9 mois entre le dépôt de candidature et la nomination des lauréats. Et le délai pour obtenir les conventions de subventions signées, 12 à 15 mois, retarde la mise en oeuvre des projets. Il est important que le fonds chaleur puisse revoir certaines attributions lorsqu’il y a une forte inflation des prix des chaudières biomasse par exemple. L’accompagnement des industriels est aussi nécessaire pour valoriser leurs gisements de chaleur fatale et encourager les synergies avec les lieux de consommation en proximité. Un dispositif de type fonds de garantie sécuriserait les projets et accélérerait les prises de décisions. Enfin, la transition énergétique ne se fera pas sans talents et sans compétences. Les enjeux sont forts. Pour accompagner l’accélération de la décarbonation des territoires, Dalkia recrute entre 2 000 et 3 000 salariés chaque année !

Sylvie Jéhanno
Sylvie Jéhanno
présidente-directrice générale de Dalkia
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