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« C’est aux territoires d’inventer leur avenir écologique » – Anthony Cellier, Député du Gard

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Primo-député venant de la société civile (anciennement cadre supérieur dans le monde de la publicité), comment en vient-on à se spécialiser dans les questions énergétiques ? Pourquoi cet intérêt ?

Anthony Cellier : Il était naturel pour moi de m’intéresser et de me positionner, en tant que député, sur l’écologie. Mon histoire personnelle et notamment mon éducation ont ancré en moi le respect de la na­ture au sens large du terme.

Pour ce qui concerne les questions énergétiques, ces problématiques entrent parfaitement en réson­nance avec mon territoire, le Gard rhodanien, et plus largement la vallée du Rhône. En effet, vous retrouvez les barrages hydrauliques de la Compagnie nationale du Rhône, des installations photovoltaïques et éo­liennes, le site du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) de Marcoule, un peu plus loin la centrale du Tricastin où travaillent de nombreuses personnes du territoire, tout celà repré­sente une part importante du tissu socio-économique local.

Et si on regarde bien, on retrouve la quasi-totali­té du panel énergétique français qui va de l’ancien mode, avec la centrale au fioul d’Aramon récemment fermée, au socle de notre actuelle stratégie : le nu­cléaire, jusqu’aux énergies renouvelables qui consti­tuent notre potentiel de développement. C’est un laboratoire de ce qu’on peut expérimenter en termes de transition énergétique et surtout un formidable vi­vier d’emplois et d’innovations.

À la rentrée, Nicolas Hulot démissionnait de son poste de ministre de la Transition écolo­gique et solidaire. Quel est votre sentiment à ce sujet ?

AC. : La démission de Nicolas Hulot : on savait que ça allait se passer, toute la question était de savoir quand ça allait arriver. Sur la forme, la manière est as­sez révélatrice de ce qu’est Nicolas Hulot, un homme sincère, foncièrement engagé pour sa cause, qui fait les choses sans arrière-pensée politique. Ce trait de personnalité explique qu’il ait eu du mal à se prêter à l’exercice qui fait le quotidien des femmes et hommes politiques : trouver le juste équilibre.

Sur le fond, je trouve que son départ est regrettable et Nicolas Hulot verra en tant que spectateur, et non acteur, le fruit de l’action considérable qu’il a engagée il y a un an, avec le soutien des très nombreux parle­mentaires dotés d’une sensibilité écologique.

Que pensez-vous du choix de nommer François de Rugy pour le remplacer ?

AC. : Le choix de François de Rugy, c’est celui du président de la République, que je soutiens, je n’ai pas à le commenter. Toutefois, pour avoir travaillé avec le nouveau ministre d’État, l’avoir reçu dans ma cir­conscription dans le cadre de la loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information, et connaître son engagement et son expertise sur les questions écologiques, je n’ai aucun doute sur sa capacité à poursuivre le programme environnemental d’Emma­nuel Macron sur lequel les députés de la majorité se sont fait élire.

Plus globalement, êtes-vous satisfait du bilan du Gouvernement en matière d’écologie ? Quelles sont vos attentes pour le reste du quinquennat ?

AC. : Un an plus tard, nous avons un bilan dont nous n’avons pas à rougir : annonce de la fermeture des centrales à charbon pendant le quinquennat, sor­tie du glyphosate à trois ans, loi pour la fin de l’ex­ploration et de l’exploitation des hydrocarbures, plan biodiversité, plan sur l’économie circulaire… Ce sont des avancées, en faveur de notre planète, qui auraient dû être faites depuis fort longtemps. Mais au vu de l’urgence climatique que nous vivons, ce ne sont en­core que de petits pas et nous devons aller plus loin !

Je pense qu’il faut aussi insister sur le changement de rapport à l’écologie qui est en train de s’opérer. Désormais, on aborde l’écologie sur un plan prag­matique et efficace, afin qu’elle ne soit pas là pour empêcher mais pour faire. C’est l’écologie qui va dé­clencher une dynamique, qui va booster l’économie.

Au cours des derniers mois, la Program­mation pluriannuelle de l’énergie (PPE) a été l’actualité forte de la transition énergétique. Quel regard portez-vous sur le débat ? Et sur l’absence notable d’un rôle donné à la repré­sentation nationale dans l’élaboration de la PPE ?

AC. : Le débat public sur la PPE a bien fonctionné avec des échanges partout en France. Mais, à mon sens, il faut absolument que les parlementaires, re­présentants des citoyens, soient saisis de la PPE, feuille de route de la transition énergétique et base de notre politique énergétique, dont les choix ont des conséquences pour les décennies à venir. Nous avons l’avantage d’avoir une vision plus large de l’ensemble des problématiques énergétiques sans pour autant nous transformer en techniciens. Peut-être faut-il une loi programmatique… C’est ce que nous préco­nisions avec 100 députés LREM dans une tribune pu­bliée dans Le Monde en juin dernier à mon initiative et celle de mon collègue, Jean-Charles Colas-Roy.

Lire aussi : Quelle place pour le nucléaire dans le mix énergétique français ?

Le débat sur la PPE a mis en exergue la volonté des citoyens de voir les territoires lar­gement impliqués dans la transition énergé­tique. Dans votre circonscription du Gard, vous avez été à l’initiative de la signature d’un contrat de transition écologique (CTE) ; dans quelle mesure ce dispositif permet-il de ré­pondre à cette demande ? Comment d’après vous les territoires peuvent-ils agir le plus effi­cacement pour la transition énergétique ?

AC. : Les citoyens attendent des territoires qu’ils s’engagent pleinement dans la transition énergétique. Dans cette optique, les CTE sont une fantastique opportunité. En effet, les CTE sont de véritables dé­monstrateurs qui permettent aux territoires d’inven­ter leur avenir écologique, économique, énergétique. C’est pourquoi j’ai été à l’initiative du CTE Aramon- Gard rhodanien qui englobe notamment la recon­version de la centrale thermique au fioul d’Aramon, fermée en 2016, afin de transformer cet impératif climatique en quelque chose de positif pour tout le territoire, au sens large. Dans ma circonscription, tous les acteurs, institutionnels comme économiques, (collectivités, services décentralisés de l’État, entre­prises) se sont embarqués dans cette dynamique à long terme. Avec le CTE, on plante la graine pendant trois mois, on travaille pendant trois ans pour la faire grandir et on récolte les fruits pendant 30 ans.

Avec sa vingtaine de fiches-actions, le CTE va développer des centrales photovoltaïques, des opé­rations pour effectuer des économies d’énergie, des écoles formant au démantèlement des installations polluantes, le développement du fret multimodal, etc. Tous ces chantiers vont stimuler l’activité et l’attracti­vité du territoire. Et tous ces aspects répondent à une logique d’efficacité, c’est pourquoi les subventions sont fléchées et les résultats obligatoires et quanti­fiables, que ce soit en carbone, en création d’emplois ou en économies d’énergie. Tout l’intérêt des CTE est de démontrer que l’écologie et l’économie sont compatibles.

Centrale

Centrale thermique d’Aramon

Vous participez à la mission d’information relative aux freins à la transition énergétique ? Quelles sont les principales entraves à la réussite de la transition énergétique ?

AC. : Je préfère parler d’opportunités mais on ne peut pas nier qu’il y a des freins notamment au niveau fiscal, au niveau des entreprises et des poli­tiques, même si la conscience collective est déjà bien développée. Il y a encore du travail ! Ces freins seront levés grâce à la démonstration, d’où l’importance de mettre en place des initiatives ambitieuses dans les territoires pour donner envie aux citoyens et aux élus d’y aller.

Lire aussi : Comment concilier la lutte contre le dérèglement climatique et l’économie ?


ENTRETIEN AVEC
Anthony Cellier, député La République en Marche (LREM) de la 3e circonscription du Gard et membre du Conseil supérieur de l’énergie (CSE)

Propos recueillis par Olivier Lagrange (EdEnmag)

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