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Le Danemark, leader européen de la transition énergétique : ambitions et débats

© Belga News Agency / Alamy Stock Photo
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Le 1er juillet 2025, le Danemark prendra la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne (UE) avec, à sa charge, la poursuite des discussions sur les projets clés en matière d’action climatique et de développement industriel, notamment sur le Industrial Decarbonisation Accelerator Act attendu pour le dernier trimestre 2025.

Champion des renouvelables, le Danemark bénéficie d’une réputation de leader de la transition énergétique. Objectifs climatiques ambitieux, volontarisme politique et sociétal, projets et investissements d’envergure : si le Danemark a tout d’un premier de la classe de la transition énergétique, le pétrole et le gaz conservent néanmoins des places importantes dans son économie.

La politique d’action climatique du Danemark : entre ambitions et débats

Le Danemark bénéficie d’un quasi-consensus en matière de politique climatique, ce qui lui a permis de se fixer un objectif de réduction de 70 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2030 par rapport au niveau de 1990, nettement plus ambitieux que l’objectif européen de réduction de 55 %. Il n’en demeure pas moins que des divergences persistent sur la mise en œuvre de ces ambitions.
La percée du parti social-démocrate lors des élections législatives de juin 2019 a entraîné une reconfiguration du paysage politique danois bouleversant le rapport de force au profit des partis de gauche, le « bloc rouge ». Celui-ci a renversé la précédente coalition de droite, menée par le Premier ministre libéral Lars Løkke Rasmussen. Une position confirmée lors des élections législatives anticipées de 2022, qui a conduit à la mise en place d’un gouvernement majoritaire centriste dirigé par Mette Frederiksen.
Critiqué à plusieurs reprises pour son manque d’action en matière de climat, le gouvernement danois souffre aujourd’hui d’une cote de popularité en chute libre. S’il propose de développer les énergies vertes et le biogaz dans le cadre d’un nouveau paquet énergétique intitulé « Le Danemark peut faire plus II », certains partis lui reprochent de ne pas en faire suffisamment pour tenir ses engagements, tandis que d’autres questionnent la capacité du Danemark à mettre en œuvre ses objectifs.

Vers une indépendance des fossiles

Depuis près de 50 ans, le Danemark mène une politique de transition énergétique pour s’affranchir des énergies fossiles d’ici 2050. Avec plus de la moitié de sa production d’énergie provenant en 2023 de sources renouvelables, le Danemark intègre une part de renouvelables croissante dans son système énergétique, bien qu’il continue de recourir aux ressources fossiles.
Avec plus de 6 000 éoliennes et une capacité installée dépassant les 10 GW, le Danemark a développé une filière éolienne compétitive. Un déploiement qui n’est pourtant pas sans défis, puisque la complexification des chaînes d’approvisionnement et la hausse des coûts des matières premières ont rendu les projets moins rentables. L’échec, annoncé en décembre 2024, du plus important appel d’offres jamais lancé visant à la construction de trois parcs éoliens offshore de 1 GW chacun, a incité le gouvernement danois à revoir son cadre d’enchères et à renforcer le dialogue avec les industriels.
En ce qui concerne l’énergie nucléaire, le Danemark a fait le choix de ne pas y recourir dans sa production d’énergie. Ne disposant d’aucune centrale nucléaire, le réseau danois dépend cependant d’importations d’énergie issues du nucléaire, suédois notamment.

De larges investissements dans les filières de transition

Le Danemark bénéficie d’une longue tradition de recherche et de soutien aux technologies propres, qui lui a permis de se positionner en leader des technologies propres. En 2022, le gouvernement danois annonçait ainsi la création d’un fonds vert, disposant d’une enveloppe de 53,5 milliards de couronnes danoises (7,1 Mds€) pour des investissements dans ces technologies stratégiques.
Le marché des pompes à chaleur danois a bénéficié de divers programmes de financement soutenant le déploiement des pompes à chaleur. Le gouvernement danois a notamment consacré 250 millions de couronnes danoises (33,5 M€) pour promouvoir le chauffage « vert » et a reconduit le populaire oil and natural-gas boiler scrapping scheme.
Le marché de la mobilité électrique connait un fort succès, puisque les véhicules électriques avec batterie (BEV) ont constitué plus de 50 % des nouvelles immatriculations en 2024. Cette forte pénétration des véhicules électriques a par ailleurs généré une accélération du marché des batteries danoises, qui a connu une hausse d’environ 43 % en 10 ans. En matière de gestion du carbone, le Danemark a développé une politique volontariste suite à la publication de sa stratégie CCS (2021) et de son plan d’action Climate action – In line with capture and storage of CO₂ (2023). En vue de capter environ 2,3 millions de tonnes de CO₂eq par an à partir de 2030, le Danemark a mis en place un cadre de soutien financier inédit de 8 milliards de couronnes danoises (1 Md€) à travers le CCUS Fund (2023). Le groupe Ørsted a ainsi obtenu un contrat de 20 ans dans le cadre du projet Ørsted Kalundborg Hub pour le captage de CO2 sur la centrale électrique d’Asnæs alimentée par des copeaux de bois et sur la centrale électrique d’Avedøre alimentée en biomasse.

Le Groenland : un potentiel convoité

Le Groenland est un territoire convoité pour la richesse de son sous-sol en métaux critiques, essentiels au développement des technologies propres. Si la Chine détient le quasi-mono- pole de la production et de la transformation de ces métaux, le Groenland pourrait changer les règles du jeu, puisque celui-ci semble abriter de grands gisements inexploités de métaux critiques.
Autonome mais constitutif du Royaume du Danemark, le Groenland n’est pas partie intégrante de l’Union européenne puisqu’il a décidé de s’en retirer en 1985. Le territoire conserve toutefois le statut de territoire d’outre-mer associé à l’Union européenne et reste partie prenante à certaines politiques de l’UE, notamment en matière de financement et de relations commerciales.
L’île attise les convoitises et les investissements du monde entier, au point que le président des États-Unis Donald Trump a réitéré sa proposition d’achat du Groenland au lendemain de son investiture. Le Groenland regorge en effet de fer, de nickel, d’or et, surtout, de métaux rares. Ce sont ces derniers qui intéressent les puissances occidentales qui souhaitent réduire leur dépendance vis-à-vis de la Chine et de la Russie, présentes aussi sur la zone.
Ces vingt dernières années, le nombre de licences minières sur l’île a explosé, passant de 19 en 2001, à une centaine en 2022. De nombreuses entreprises, telles que KoBold Metals (États-Unis) ou Shenghe Ressources (Chine), principal actionnaire de Greenland Minerals, se sont lancées dans un bras de fer pour l’exploration et l’exploitation du sous-sol groenlandais. L’Union européenne place elle aussi ses pions, voyant dans le Groenland une opportunité de diversifier son approvisionnement en métaux critiques. La présidente Von der Leyen a ainsi célébré en juillet 2023 l’inauguration en Estonie de la première usine en Europe d’aimants permanents à base de terres rares, approvisionnée par une mine à l’ouest du Groenland.

Anna Mensch
Anna Mensch
consultante en affaires européennes, Équilibre des Énergies
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