Pour atteindre la neutralité carbone, la France doit poursuivre le développement des énergies bas carbone que sont les renouvelables (EnR) et le nucléaire. Toutefois, c’est lorsqu’il y a du vent ou du soleil que les éoliennes et les panneaux photovoltaïques produisent de l’électricité. Développer des capacités de stockage pourrait contribuer à augmenter la valeur de leur production et optimiser le pilotage du système électrique français.
Il existe deux grands types de stockage d’électricité : le stockage embarqué, utilisé en particulier dans les véhicules électriques, et le stockage stationnaire qui est fixe. À l’heure actuelle, en France, l’essentiel du stockage stationnaire se fait par des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), une technique développée au milieu des années 1970. Il s’agit d’un système hydroélectrique reposant sur deux bassins situés à des altitudes différentes.
Les batteries fixes constituent l’autre partie du stockage stationnaire. C’est ce type de stockage que nous allons détailler.
Stockage d’électricité par batteries stationnaires : où en est-on ?
La dynamique de raccordement de batteries sur les réseaux publics de distribution et de transport d’électricité est soutenue depuis quelques années. À date, environ 1 GW de batteries stationnaires sont raccordées en France sur les réseaux.
Sur le réseau de distribution exploité par Enedis, les capacités de stockage raccordées en moyenne tension (HTA) ont été multipliées par 11 en 4 ans : elles sont passées de quelques MW en 2020 à 607 MW à la fin 2024.
Cette tendance se poursuit avec un volume de projets en cours de développement sur le réseau public de distribution de 780 MW. Ces installations de stockage stationnaire sont majoritairement raccordées en moyenne tension à proximité des postes de transformation haute tension/moyenne tension. Cela permet de limiter leur coût de raccordement.
Au-delà du développement d’installations de stockage sur les réseaux de distribution, l’installation de très fortes capacités, raccordées au réseau de transport d’électricité est envisagée. La construction d’une plate-forme de stockage d’énergie par batterie de 240 MW a été lancée dans la Marne. Cette tendance vers des installations de très forte capacité semble s’affirmer.

Quels usages du stockage d’électricité par batteries stationnaires ?
Pour le système électrique
Les batteries stationnaires participent au bon fonctionnement du système électrique qui nécessite un équilibre constant entre la production et la consommation d’électricité. Les 607 MW de batteries installées aujourd’hui sont principalement utilisés comme des réserves d’énergie de court terme dans le cadre des services systèmes opérés par le gestionnaire de réseau de transport d’électricité pour préserver cet équilibre.
Les batteries peuvent aussi être valorisées pour maintenir l’équilibre offre/demande du système électrique sur des pas de temps plus longs en transférant de l’énergie entre heures de la journée, par exemple lors d’un pic de consommation hivernal ou un surplus de production estival.
Pour optimiser une production, un process industriel, un usage
Suivant les fluctuations du prix de l’électricité et le prix des batteries, il peut être intéressant de stocker dans une batterie de l’électricité produite par des panneaux solaires à un moment où la consommation est inférieure au niveau de production, notamment pendant l’après-midi des jours ensoleillés.
Le stockage peut également être utilisé pour optimiser un usage : c’est le cas avec certaines bornes de recharge pour véhicules électriques à forte puissance. Avec une batterie placée à proximité de la borne, l’opérateur de l’ensemble peut acheter l’électricité pour remplir la batterie au moment opportun, à un prix optimisé. Les appels de puissance peuvent également être mieux maîtrisés, ce qui peut avoir un intérêt dans les zones rurales et périurbaines.
Pour limiter des contraintes réseaux
Les batteries stationnaires peuvent localement rendre des services aux réseaux de transport et de distribution d’électricité. Enedis lance régulièrement des appels d’offre sur des zones où un besoin de flexibilité a été identifié. Historiquement, les flexibilités proposées étaient constituées d’ajustements de la consommation ou d’écrêtements de la production. Les batteries stationnaires viennent compléter ce bouquet de flexibilités. Deux offres de flexibilité basées sur des batteries stationnaires ont été signées en 2023, dix offres supplémentaires ont été retenues dans le dernier appel d’offres flexibilités d’Enedis en 2024.
Pour un usage propre au réseau
La règle générale posée par la directive européenne 2019/944 est que le stockage est une activité concurrentielle ayant vocation à se valoriser sur de multiples services et marchés. À ce titre, elle interdit la possession, l’exploitation ou le développement d’installations de stockage par les gestionnaires de réseau.
Cependant, la directive prévoit que, de manière exceptionnelle, les gestionnaires de réseau peuvent recourir à du stockage pour des usages en propre, celui-ci est alors qualifié de composant pleinement intégré au réseau. L’utilisation de batteries de secours dans les postes sources est un cas d’usage de stockage propre au gestionnaire de réseau qui rentre dans cette exception.
C’est aussi le cas des groupes électrogènes permettant la réalimentation en cas de coupure pour travaux ou incidents ou l’alimentation provisoire d’événements particuliers (photo). Dans le cadre du partenariat entre Paris 2024 et Enedis, dix groupes électrogènes zéro-émission ont été installés dans le parc du château de Versailles pour l’épreuve olympique de cross-country. Leur utilisation a permis de réduire l’empreinte carbone de l’événement.
À Versailles, le 28 juillet 2024, pour l’épreuve de cross-country d’équitation des Jeux olympiques de Paris, Enedis a alimenté en électricité sans émission de CO2 des caméras, une antenne 5G, des food-trucks et des écrans géants avec dix groupes électrogènes zéro-émission.
Qu’est-ce qu’un groupe électrogène zéro-émission (GE ZE) ?
Un groupe électrogène zéro-émission remplit les mêmes fonctions que les groupes électrogènes diesel en apportant des bénéfices environnementaux et d’usage :
- suppression de 100 % des émissions locales directes de CO2 ;
- diminution des nuisances sonores ;
- disparition des nuisances olfactives ;
- diminution des nuisances vibratoires ;
- aucune émission de fumée.

© Enedis
Et demain
Les scénarios d’évolution du volume de batteries sur le réseau électrique sont très diversifiés. Il faut raisonner en termes de bouquet de flexibilités, indépendamment de la technologie utilisée. Chaque technologie a ses points forts et les batteries sont efficaces pour certains cas de flexibilité, notamment à l’échelle de la journée. Dans son Bilan prévisionnel, RTE a proposé un bouquet de flexibilités de référence avec 6 GW supplémentaires de batteries en 2030, associés à 3 GW de flexibilités thermiques. D’autres scénarios, avec un fort développement des interconnexions européennes ou plus de capacités thermiques, limiteraient le besoin de batteries pour assurer le bon fonctionnement du réseau.