Durée de vie et réparabilité, autonomie et temps de recharge, impact sur le climat et l’environnement, facteur de dépendance ou d’indépendance, les batteries des véhicules électriques suscitent de nombreuses questions au moment où la fin de vente des véhicules thermiques neufs se profile. Équilibre des Énergies apporte quelques éléments de réponse.
Quelle est l’autonomie réelle des véhicules électriques avec les batteries d’aujourd’hui ?
L’autonomie dépend du véhicule, de l’usage que l’on en fait et, dans une moindre mesure, de paramètres externes tels que les conditions météorologiques sur un trajet donné.
La référence imposée aux constructeurs depuis 2019 est le cycle WLTP (1) qui correspond à un parcours type incluant de l’urbain, de l’extra urbain et des parties sur autoroute à 110 km/h.
Les véhicules électriques les plus récents ont une autonomie WLTP d’environ 320-400 km pour les citadines avec des batteries de 40 à 50 kWh. Les routières embarquent des packs de 75 à 100 kWh pour une autonomie de 550 à 750 km pour les meilleures. Les SUV, très populaires, se situent entre les deux, avec une autonomie d’environ 550 à 600 km pour les meilleurs.
Dans le cycle WLTP, le véhicule est soumis à des conditions de conduite réelles mais moyennes. Le cycle n’est donc pas représentatif d’un parcours uniquement sur autoroute à 130 km/h ou au contraire d’un parcours uniquement urbain.
Les résultats des tests publiés dans les magazines automobiles montrent que l’autonomie WLTP est relativement proche de l’autonomie réelle mesurée dans des conditions analogues à celles de la norme mais celle-ci est nettement dégradée en cas de conduite sur autoroute.
Il convient de faire plusieurs remarques :
- la consommation dépend de l’aérodynamisme de la voiture, surtout à 130 km/h ;
- la météo peut jouer de façon importante car le froid a un double effet : les batteries donnent moins de puissance et le chauffage induit une charge supplémentaire. La dégradation peut aller jusqu’à 20 % en hiver ;
- la climatisation joue également l’été mais dans une moindre mesure.
L’autonomie telle que perçue par le conducteur est assez subjective car elle dépend de la confiance du conducteur dans la possibilité de se recharger et donc de pousser son trajet plus loin. Équilibre des Énergies parle souvent dans ses travaux de « rayon d’action ».
1. WLTP : Worldwide Harmonized Light-Duty Vehicles Test Procedure.
Faut-il s’attendre à des progrès des performances dans les prochaines années ? Ne faut-il pas mieux attendre avant de passer au véhicule électrique ?
Les axes de progrès viendront de plusieurs directions :
- la densité énergétique des cellules : actuellement cette dernière se situe entre 150 et 250 Wh/kg. Les futures batteries dites « tout solide », c’est-à- dire à électrolyte solide, promettent des densités qui pourraient être assez fortement accrues, permettant d’avoir des véhicules plus légers et/ou dotés d’une autonomie augmentée. L’horizon 2028/2030 semble réaliste quant à l’arrivée de cette technologie sur le marché ;
- le nombre de cycles charge/recharge : les véhicules actuels supportent a minima de 1 000 à 1 500 cycles complets de recharge, ce qui correspond à une utilisation supérieure à 10 ans. Les futures batteries devraient per- mettre d’atteindre voire de dépasser les 5 000 cycles pour une utilisation de plus de 500 000 km ;
- la puissance de charge : les véhicules les plus performants peuvent actuellement se charger à une puissance maximale d’environ 300 kW. Demain, cette puissance pourrait dépasser les 500 kW sans dégradation prononcée de la batterie. Mais, plus que la puissance maximale, c’est la courbe de charge qui peut faire la différence en garantissant une puissance optimale de charge entre 20 et 80 %.
Ces progrès technologiques ne se feront pas avant plusieurs années car ils demandent du temps pour être validés et des investissements massifs pour leur mise en œuvre.
Quelle est aujourd’hui la durée de vie des batteries ?
Les exigences réglementaires sur la durée de vie des batteries sont fixées par la norme Euro 7 avec un seuil de capacité fixé à 80 % de la capacité initiale à 5 ans, ou 100 000 km, et 72 % à 8 ans, ou 160 000 km.
Dans la réalité, différentes études ont montré qu’après 8 ans, les batteries conservent une capacité nettement supérieure aux 70 % généralement admis comme le seuil en deçà duquel un remplacement ou une réparation sont nécessaires. Les batteries montées sur les véhicules au début des années 2010 ont encore, dans la majorité des cas, une capacité supérieure à 80 % voire 85 %.
Il convient de faire plusieurs remarques :
- les batteries sont rarement confrontées à des cycles complets, mais plutôt à des cycles partiels gérés par le BMS (Batterie Management System) ;
- les conditions de la recharge influent sur la durée de vie de la batterie. Avec les chimies actuelles, il vaut mieux privilégier les recharges lentes et éviter les recharges en cas de pic de chaleur ;
- la capacité des batteries a largement augmenté depuis l’arrivée des premières voitures. Elle permet à beaucoup de conducteurs de recharger leur véhicule une ou deux fois par semaine et donc de limiter les cycles.
La recharge bidirectionnelle, Vehicle to Home (V2H) ou Vehicle to Grid (V2G), est appelée à se développer. Elle permettra d’utiliser la batterie pour stocker de l’électricité en heures creuses et la restituer au bâtiment ou au réseau électrique en heures de pointe. Leur impact sur la durée de vie de la batterie fait l’objet d’études mais il semble qu’il restera limité.

© Volkswagen Group.
Quand on achète un véhicule d’occasion, comment peut-on s’assurer du bon état de la batterie ?
La législation n’impose aujourd’hui au- cun test lors de la revente d’un véhicule électrique de seconde main.
Les constructeurs peuvent cependant réaliser un test permettant l’émission d’un certificat officiel. Ce test consiste à effectuer un cycle de décharge/recharge complet d’environ huit heures qui permet de connaître de manière précise l’état de la batterie et sa capacité restante.
Certains constructeurs mettent en place des tests SOH (State of Health) sur les véhicules d’occasion électriques vendus par leurs réseaux.
Dans un futur proche, la communication à l’acheteur de la durée de vie de la batterie sera obligatoire lors de l’achat d’un véhicule d’occasion, mais, dès à présent, les concessionnaires ont généralement déjà les moyens de donner l’information.
Les batteries sont-elles réparables ?
Sur les véhicules, les constructeurs ont une obligation de fournir des pièces de rechange au-delà de 10 ans. Cela inclut la disponibilité d’une batterie de remplacement.
Il n’y a pas actuellement d’exigence réglementaire de réparabilité propre à la batterie.
Les constructeurs ont pris deux grandes voies distinctes pour l’architecture de la batterie :
- la « batterie pack », directement constituée de cellules et formant un élément structurel du châssis. Cette conception rend la réparation com- plexe et donc plus onéreuse ;
- la « batterie modulaire » composée de modules regroupant des cellules qui peuvent être remplacés par un technicien spécialisé. Certains constructeurs suivent cette voie, en particulier pour les batteries haut de gamme.
Les batteries sont généralement garanties huit ans ou 160 000 km. Une réparation peut avoir lieu bien au-delà de cette période si la technique de fabrication le permet.
Cependant, les batteries lithium phosphate de fer ou LFP (LiFePO4), en particulier celles fabriquées en Chine, sont souvent encapsulées dans une résine. Cela les rend meilleur marché mais irréparables.
Y a-t-il des éléments spécifiques à la sécurité des véhicules électriques comme l’incendie des batteries ?
D’une manière générale, les véhicules électriques sont moins susceptibles de prendre feu que les véhicules thermiques. Des études, conduites en Australie, en Norvège – qui n’immatricule quasiment plus que des véhicules électriques – et en Suède, ont montré que les véhicules électriques ont entre 5 et 10 fois moins de risques d’incendie que les véhicules thermiques.
Cependant, le feu de batteries est plus difficile à éteindre qu’un feu thermique.
Deux axes complémentaires sont développés par les constructeurs :
- concevoir les batteries pour qu’elles soient plus facilement inondables par les pompiers ;
- perfectionner les Battery Management System (BMS), qui surveillent l’échauffement des cellules pendant l’utilisation et la recharge, de façon qu’en cas de surchauffe, la cellule ne soit plus alimentée.
La réglementation des établissements recevant du public (ERP) limite la recharge des véhicules électriques aux niveaux allant de +1 et -1, mais l’utilisateur peut garer son véhicule sans limite aux autres niveaux.
Sommes-nous dépendants de la Chine ou d’autres pays en ce qui concerne les matériaux nécessaires aux batteries ?
Les principales chimies des batteries sont :
- d’une part le NMC (nickel, manganèse, cobalt) et le NCA (nickel, manganèse, aluminium) qui offrent une forte densité énergétique ;
- d’autre part le LiFePO4 (lithium phosphate de fer) moins cher et plus sûr mais avec une densité énergétique inférieure.
Les éléments critiques de ces chimies sont le lithium, le nickel, le manganèse et le cobalt auxquels il faut rajouter le carbone sous forme de graphite, essentiel pour les électrodes, et le cuivre.
La France ne dispose actuellement pas de ressources naturelles pour ces éléments, sauf pour le lithium, mais il faudra vaincre les réticences locales pour l’exploiter.
La Chine domine le marché de la transformation du lithium et du graphite. Le cuivre et le nickel sont mieux distribués, venant de la Chine et du Pérou pour le premier et de l’Indonésie et de la Malaisie pour le second.
Le cobalt vient essentiellement de la République démocratique du Congo, mais sa part est en diminution dans les batteries.
Contrairement aux prédictions de certains, les prix de la plupart des matériaux ont beaucoup baissé au cours des dernières années. Le cuivre reste cependant un composant stratégique critique mais pas seulement pour le véhicule électrique.

Où en sont les projets de gigafactories en Europe et en France ?
Aujourd’hui, il y a trois gigafactories en cours de construction en France :
- ACC est déjà opérationnelle et a livré 2 000 batteries fin 2024. L’usine fournit Peugeot (98 kWh), Mercedes et d’autres constructeurs ;
- AEC Envision commencera à produire en 2026 sur la base d’une technologie NMC ;
- VERKOR, un nouveau venu français, prévoit de monter une ligne de production pour 2028 pour approvisionner Alpine.
Il y a d’autres projets d’usines de batteries, notamment ceux de Blue Solutions dans l’Est et de Prologium à Dunkerque.
Cependant, le besoin d’importer des batteries subsistera, les usines françaises, sauf celle de Blue Solutions, sont orientées NMC et ne peuvent pas s’adapter immédiatement à d’autres chimies, comme le phosphate de fer notamment.

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Sait-on recycler les batteries et le fait-on aujourd’hui ?
Les procédés techniques sont au point mais il n’y a pas aujourd’hui de volumes suffisants à recycler pour permettre à la filière de réellement décoller.
Par ailleurs, le recyclage des batteries ne se limite pas à la mise en place d’une logistique de récupération des batteries. Il suppose aussi de disposer des filières de raffinage pour récupérer les matériaux critiques et éviter de renvoyer les batteries en Chine pour les recycler et racheter les matériaux critiques recyclés. Le règlement batteries de l’Union européenne impose un minimum de recyclage et d’incorporation de matériaux recyclés.
Il n’impose pas que le recyclage se fasse en Europe.
Les taux minima de matériaux recyclés ne sont pas encore arrêtés mais devraient être de :
- 12 % pour le cobalt (20 % à partir du 1er janvier 2035) ;
- 4 % pour le lithium (10 % à partir du 1er janvier 2035) ;
- 4 % pour le nickel (12 % à partir du 1er janvier 2035).
Combien de temps faut- il pour se recharger à la maison ?
Les maisons individuelles sont pour la plupart du temps équipées de bornes de 3,7 kW ou 7,4 kW qui permettent de rester dans la limite des abonnements domestiques.
Avec une borne de 7,4 kW, il faut une dizaine d’heures pour recharger complètement une batterie vide d’une soixantaine de kWh. Toutefois, la majorité des utilisateurs ne laissent pas la batterie se vider complètement. Le pilotage de la charge permet de bénéficier des tarifs des heures creuses qui sont plus avantageux.
La recharge sur autoroute : faut-il encore craindre la panne sèche ? Combien de temps dure une recharge ? Quel en est le prix ?
Depuis novembre 2024, 100 % des aires de service sur les autoroutes françaises concédées sont équipées de stations de recharge à haute puissance (HPC) qui permettent de récupérer entre 200 et 400 km d’autonomie en seulement 30 minutes selon les véhicules.
Les modèles les plus performants, équipés d’une technologie dite 800 volts, peuvent même charger de 10 à 80 % en moins de 15 minutes.

Comment faire si, en période d’affluence, toutes les stations de recharge sont occupées ?
Les réseaux de recharge rapide ont des plans d’investissement qui prévoient d’augmenter significativement la taille de ces stations au fur et à mesure du développement du parc roulant. À horizon 2035, environ 50 % des places de stationnement sur les aires de services seront électrifiées. De plus, les premières aires de repos sont en train d’être équipées de stations de recharge à haute puissance.
Avec ces développements, mais également en tenant compte des réseaux de recharge HPC qui se développent hors des autoroutes et à proximité des échangeurs, les possibilités sont nombreuses pour éviter d’attendre. Les applications des opérateurs de recharge permettent d’identifier facilement les stations où des points de recharge sont disponibles.