Les systèmes d’automatisation et de contrôle des bâtiments, en anglais Building Automation and Control Systems ou BACS, jouent un rôle crucial dans la réalisation des objectifs de sobriété énergétique et de flexibilité accompagnant l’électrification des usages, le déploiement des énergies renouvelables et l’équilibre du réseau électrique. Cependant, les BACS sont aujourd’hui insuffisamment déployés. Il est nécessaire d’accélérer leur adoption et de mieux les exploiter afin d’en tirer tous les bénéfices, à la fois sur le plan financier et sur le service que ces systèmes peuvent rendre au réseau électrique parfois contraint.
Un déploiement des BACS en croissance mais encore loin des objectifs
La figure 1, tirée de l’observatoire du déploiement des BACS (GIMELEC, octobre 2024) illustre l’évolution du pourcentage de bâtiments tertiaires français équipés de BACS de 2017 à 2024. En 2017, seuls 12 % des bâtiments étaient équipés. Ce chiffre a légèrement augmenté pour atteindre 15 % à fin 2024. Cette progression, bien que modeste, montre une prise de conscience croissante de l’importance des BACS dans la gestion énergétique des bâtiments. L’effort à fournir reste cependant important si l’on veut répondre, à l’horizon 2030, au plan « 100 000 BACS ».

Une dynamique très variable selon les secteurs
La figure 2 présente le taux d’équipement des BACS selon les secteurs et la surface des sites. Les secteurs de la santé, du transport et de la logistique montrent des taux d’équipement plus élevés, probablement en raison de la nécessité d’une gestion énergétique particulièrement efficace dans ces domaines. Les bureaux, les commerces et l’enseignement, bien que représentant une part significative du parc tertiaire, connaissent des taux d’équipement plus variés. Les hôtels, restaurants et habitations communales affichent les taux les plus bas, soulignant le besoin d’accentuer les efforts dans ces secteurs.

Les bâtiments les plus vastes sont les plus équipés
La figure 3 met en évidence l’impact de la superficie des bâtiments sur le taux d’équipement en BACS. Les bâtiments de grande taille, notamment ceux de plus de 20 000 m², sont beaucoup plus susceptibles d’être équipés en BACS, avec un taux d’équipement dépassant les 80 %. Cette tendance s’explique par le fait que les grands bâtiments bénéficient historiquement d’une gestion technique à grande échelle, nécessitant des systèmes de pilotage énergétique avancés.
Cependant, une optimisation des systèmes existants et des actions de « recommissioning » sont nécessaires en raison de l’ancienneté de ces équipements.

Une exploitation des BACS loin d’être optimale
Un constat alarmant révélé par l’étude du GIMELEC est que près de la moitié des BACS installés dans les bâtiments ne sont pas exploités de manière optimale. Cette situation est souvent due à une absence d’organisation dédiée et de compétences spécifiques chez les propriétaires et gestionnaires de bâtiments. Les systèmes non exploités ou mal paramétrés ne permettent pas de réaliser les économies d’énergie escomptées et ne prennent pas en compte les réaménagements ou changements de preneurs. L’évolution des systèmes de gestion technique des bâtiments (GTB) vers plus de simplification et d’interopéra- bilité offre cependant des perspectives d’amélioration.
Une accélération nécessaire
Pour atteindre les objectifs de sobriété et de décarbonation fixés par le décret BACS, une accélération s’impose. À l’heure actuelle, seulement 18 % des sites seraient équipés de BACS en 2027, un chiffre bien en deçà des 100 % visés.
La France doit impérativement tenir ses objectifs de réduction de 40 % des consommations énergétiques d’ici 2030, inscrits dans le dispositif éco-énergie tertiaire (DEET). Pour y parvenir, un plan d’accélération est nécessaire, incluant des feuilles de route prioritaires pour les parcs immobiliers, les bureaux, les commerces et l’enseignement. La réactivation et la mise à jour des systèmes existants, ainsi que la formation des équipes sur le terrain, sont également cruciales.
La double vertu des BACS avec la mention Flex Ready®
Les BACS présentent une double vertu : économiser l’énergie et la consommer au bon moment. En dotant un bâtiment d’un système de pilotage BACS, on lui donne les moyens de consommer moins d’énergie et de programmer la consommation en fonction des heures pleines/heures creuses. On peut ainsi déplacer la consommation hors des pointes, vers les moments de production abondante et décarbonée et, in fine, d’al- léger la facture. C’est la flexibilité régulière, quotidienne, implicite.
De plus, les bâtiments équipés de BACS FlexReady® – une marque animée par Think Smartgrids, lancée en octobre 2024 par le collectif Think Smartgrids, RTE, ENEDIS et GIMELEC – sont capables d’aller au-delà de la flexibilité régulière, en réagissant à une demande extérieure. Imaginons une journée de plein soleil et de grand vent : le fournisseur d’énergie ou l’agrégateur peuvent être amenés à envoyer, sur une plage donnée, un signal de proposition de décalage de la consommation ou d’intensification par recharge des batteries par exemple. Le BACS reçoit ce signal et peut enclencher un scénario préprogrammé. C’est la flexibilité dynamique, qui répond aussi aux besoins d’équilibrage du réseau en cas de besoin (EcoWatt).
À l’échelle nationale, la sobriété énergétique n’est pas le seul enjeu. L’électrification des usages, tels que la recharge des véhicules électriques ou l’alimentation des pompes à chaleur, est, avec la souveraineté énergétique, au cœur des préoccupations. Des modèles économiques se développent pour récompenser les efforts réalisés dans les bâtiments pour recharger les voitures ou activer le chauffage, la ventilation et la climatisation aux moments où l’électricité nationale est abondante, évitant aussi au passage les pics de consommation.
Conclusion
Le déploiement des BACS est essentiel pour atteindre les objectifs de sobriété énergétique et de flexibilité en France. Une accélération des efforts est nécessaire pour équiper les bâtiments tertiaires de ces systèmes, tout en assurant leur exploitation optimale. Les BACS offrent une solution prometteuse pour consommer moins d’énergie et la consommer de manière plus intelligente, contribuant ainsi à la transition énergétique et à la souveraineté énergétique du pays.
Historiquement positionnée sur la décarbonation des logements, Équilibre des Énergies a élargi son champ de réflexion aux bâtiments tertiaires.
Représentant un quart des bâtiments, mais un tiers des consommations d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre, le secteur tertiaire doit pleinement contribuer à la réalisation de l’objectif, introduit par la directive sur la performance énergétique des bâtiments (DPEB), de « constituer un parc immobilier à haute efficacité énergétique et décarboné d’ici 2050, en vue de transformer les bâtiments existants en bâtiments à émissions nulles ».
Équilibre des Énergies soutient le plan 100 000 BACS porté par la filière. Ce changement d’échelle est essentiel pour réduire les consommations d’énergie, et par extension les émissions de gaz à effet de serre, ainsi que pour améliorer la nécessaire flexibilité du système électrique. En parallèle, Équilibre des Énergies approfondit les synergies entre les moyens de production et de consommation d’électricité, notamment dans les bâtiments tertiaires. Elle promeut les synergies entre véhicule électrique et bâtiment et l’intérêt de la recharge des véhicules électriques sur le lieu de travail.