En poursuivant votre navigation, vous acceptez l'utilisation de cookies pour mesurer l'audience de notre site.
FERMER

CITE 2016 : situation compliquée pour les PAC double-service & hybrides

Par le |

Alors que le Gouvernement, Président de la République en tête, multiplie les annonces en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments, voilà qu’une nouvelle fois l’administration française avance à contre courant et pénalise les Pompes à Chaleur (PAC) double-service et hybrides.

Crédit d’Impôt pour la Transition Énergétique : un dispositif vertueux, mais le diable se cache dans les détails

Conformément aux objectifs fixés par le Gouvernement, la loi de finances 2016 a reporté et simplifié l’application du Crédit d’Impôt pour la Transition Énergétique (CITE). Instauré en 2012, ce dispositif incite les ménages à réaliser, par étapes, des travaux de performance énergétique dans leur logement. En s’appliquant aux technologies les plus efficaces en terme de développement durable, « cette mesure a pour vocation une diffusion large des équipements énergétiques durables afin de contribuer à l’atteinte des objectifs ambitieux de la France en matière d’économies d’énergie et d’énergies renouvelables ».[1]

A priori, et jusqu’à cette année, dans les faits, il s’agit d’un outil vertueux au service de l’intérêt général. Mais c’était sans compter sur la célérité de l’administration à sans cesse vouloir imposer de nouvelles règles. Le coup bas vient de l’arrêté paru au Journal Officiel du 31 décembre 2015[2], qui définit les caractéristiques techniques des appareils éligibles au CITE. Il introduit pour les PAC un critère nouveau, qui élimine de fait les PAC double service et hybrides du dispositif.[3]

Cette annonce intervient alors que le marché pour ces produits peine à se développer. Pourtant les PAC hybrides et double-service représentent un vrai progrès tant en terme de réduction de la consommation d’énergie que de bilan carbone : « Ne pas accorder le CITE sur ces appareils va porter un coup d’arrêt fatal à la technologie. Hormis l’aspect financier, c’est l’image de ces produits qui sera atteinte », juge un industriel du secteur.

Marché des PAC : instabilité des politiques publiques de soutien

Au delà des conséquences économiques, c’est un message évidemment négatif qui porte atteinte aux PAC, déjà pénalisées par la Réglementation Thermique 2012[4]. Ce nouvel épisode met une fois de plus en exergue l’absence, ou pour le moins, le manque de concertation entre les services de l’État[5].

Dès juin 2015, le Secrétaire Général de l’AFPAC[6], Gérard Charney, regrettait que : « La filière (soit) souvent oubliée dans les dispositifs d’accompagnement des pouvoirs publics »[7], mais confiant, son Président Thierry Nille annonçait « une concertation entre l’ADEME et les ministères concernés (Ecologie et Logement), prévue dans les prochains mois » [8].

En particulier, l’élaboration d’une fiche d’opération standardisée pour les PAC hybrides les rendant éligibles aux Certificats d’Economie d’Energie (CEE) a été mise au point et validée par l’ADEME, la DGEC et les industriels. Elle devrait être publiée dans le prochain arrêté[9] et proposer une valorisation supérieure à celle des PAC double service… Chacun appréciera la contradiction !

Pour en savoir plus sur l’environnement législatif des PAC, nous vous invitons à consulter l’article de batiactu rapportant l’intervention de la Vice-Présidente de l’AFPAC, Madame Valérie Laplagne, à l’occasion de la journée J3PAC[10].

Réaction de l’administration : Vers un arrêté rectificatif ?

Face aux protestations de la filière, AFPAC et UNICLIMA en-tête, la DGEC s’est engagée à publier un arrêté rectificatif qui modifiera le niveau d’exigence d’efficacité énergétique en eau chaude sanitaire pour les PAC double-service. Cette mesure permettra de réintégrer cette technologie au dispositif CITE. Le texte en projet a été détaillé par Madame Martine Leclercq[11] de la DGEC, à l’occasion de la journée J3PAC.

Pour autant, les PAC hybrides continueront d’en être exclues…

(Télécharger la présentation de la DGEC à la J3PAC)

Pour les spécialistes :

Il est fait grief à l’arrêté d’avoir introduit sans concertation avec la profession un critère sur la performance en eau chaude sanitaire pour les pompes à chaleur double service :

Figure 1

Figure 1 : Extrait de l’arrêté du 30 décembre 2015

Il est ainsi demandé aux PAC double-service et aux systèmes hybrides d’atteindre les mêmes seuils d’efficacité énergétique que les chauffe-eaux thermodynamiques.

Seulement, les systèmes ne sont pas comparables à cause du mode de fonctionnement. Un chauffe-eau thermodynamique est un appareil dédié à la production d’eau chaude, alors qu’une PAC double service ou hybride fournit à la fois le chauffage et l’eau chaude sanitaire. Le pilotage des deux appareils n’est donc pas le même. Une PAC double service ou hybride, est un appareil qui a pour finalité principale la production de chauffage, en particulier en rénovation. Il est donc dimensionné sur ce critère. Pour obtenir une bonne performance en chauffage, le fluide frigorigène utilisé est optimisé pour être efficace à une température plus basse que dans le cas d’un chauffe-eau thermodynamique. Il en résulte une différence de performance entre les appareils sur la production d’eau chaude.

Les limites imposées ne sont pas réalistes : elles éliminent, de facto, l’ensemble des pompes à chaleur double service et les systèmes hybrides du dispositif CITE.

La DGEC a annoncé la publication d’un arrêté rectificatif pour les PAC double-service, qui modifierait les valeurs d’efficacité énergétique « chauffage de l’eau » selon le profil de soutirage et les ramènerait aux valeurs suivantes :

Figure 2

Figure 2 Efficacité énergétique « chauffage de l’eau » selon profil de soutirage (Cf. arrêté modificatif en cours pour rectification matérielle), extrait de la présentation de Madame Martine Leclercq, 2 février 2016, Évolution du CITE, le régime applicable à la géothermie de minime importance, diapositive n°6

Pour les néophytes :

Qu’est ce qu’une pompe à chaleur ?
Une PAC récupère les calories de l’air extérieur pour les restituer au circuit de chauffage.[12] Elle peut être utilisée sur une nouvelle installation en habitat neuf ou venir en complément ou en substitution d’un système de chauffage et de production d’ECS existant dans le cadre d’une rénovation.[13] 

Qu’est ce qu’une pompe à chaleur double service ?
La PAC double-service, permet de concentrer, sur une seule et unique machine, la production de chaleur pour les besoins d’eau chaude sanitaire et les besoins de chauffage. Il s’agit d’une solution « 2 en 1 ». Il existe plusieurs configurations de la PAC, qui dans le cas d’une PAC réversible, peut assurer le rafraîchissement en période estivale parallèlement à la production d’eau chaude sanitaire.[14] 

Qu’est ce qu’une pompe à chaleur hybride ?
La PAC hybride est une pompe à chaleur complétée (ou « assistée ») par une chaudière à combustible fossile[15]. Elle permet d’utiliser de façon rationnelle et performante la biénergie : la PAC fonctionne seule pendant une majeure partie de la saison de chauffage et en dessous d’un certain seuil de température extérieure[16] la chaudière à combustible fossile vient la compléter en terme de puissance (fonctionnement en parallèle) ou la remplacer (fonctionnement alternatif). Il convient de noter que d’autres critères que la température extérieure peuvent aujourd’hui ou demain gérer le fonctionnement complémentaire ou alternatif des deux générateurs (prix des énergies, contenu CO2, charge réseaux, etc.).

Comment sont élaborés les arrêtés ?

Une première version de l’arrêté est rédigée par les services de la DGEC, généralement en concertation avec les industriels concernés. Puis elle est transmise à l’ADEME pour avis. Elle retourne alors à la DGEC qui peut à son tour, soit la publier en l’état, soit en réécrire certains points, avec ou sans la consultation des industriels.

Dans le cas de l’arrêté du 31 décembre 2015 relatif au CITE, les industriels ont été uniquement associés par la DGEC à la première phase de rédaction du document. La mesure décriée ayant été introduite durant la navette DGEC – ADEME, sans que la DGEC ne se rapproche des industriels pour la valider…


Pourquoi Équilibre des Énergies soutient le développement de la biénergie ?

L’association porte une attention particulière au développement des solutions biénergie, qui permettent d’accompagner la montée en puissance de la production ENR, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre et en limitant la facture pour le citoyen. La biénergie est également un atout en terme d’indépendance énergétique nationale, puisqu’elle fait appel à des sources énergétiques diversifiées.

Équilibre des Énergies (EdEn) prend comme postulat l’objectif du Gouvernement, notamment au travers de le Loi de Transition Énergétique pour le Croissance Verte (LTECV), d’amener à 50% la part de l’atome dans la production électrique française d’ici à 2025 ; Avec comme impératif de ne pas augmenter les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES).

EdEn a développé une analyse approfondie des conséquences de l’introduction massive des ENR dans le système électrique. Le principal obstacle, en particulier quand il s’agit de photovoltaïque ou d’éolien, est le caractère intermittent de la production électrique d’origine renouvelable : Il nécessite la mise en place d’une régulation du système électrique.

Dans ce contexte, les dispositifs biénergie (électricité/fioul, électricité/bois, électricité/gaz), pourront dans un avenir proche apporter une réponse intéressante aux vagues de froid et/ou de pénurie de vent (situation anticyclonique).

Ainsi, grâce à la gestion des demandes d’énergie électrique effaçables, les dispositifs biénergie peuvent apporter une importante contribution à la maîtrise de ces variabilités, au moindre coût et avec le moins possible d’émissions de CO2 supplémentaires.

Quelques exemples d’utilisation de la biénergie en rénovation :

Maison individuelle chauffée au gaz
Les chaudières biénergie (électricité en base, gaz en situation tendue) pourraient trouver une valorisation importante par leur contribution à la régulation du système électrique répercutée pour l’utilisateur grâce à des dispositions tarifaires adéquates.

Maison individuelle chauffée à l’électricité (« tout électrique »)
Lorsque la maison dispose d’un cheminée, l’installation d’un insert ou d’un poêle à bois permet un fonctionnement en biénergie (électricité en base, bois en période tendue) contribuant à la régulation du système électrique et générateur d’économies d’émissions de CO2.

Immeuble à chauffage collectif au gaz
Le remplacement d’une chaudière à gaz collective par une pompe à chaleur est une solution techniquement envisageable dès aujourd’hui lorsque la boucle d’eau chaude n’est pas à une température élevée. La mise au point de pompes à chaleur à plus haute température de taille bien adaptée peut prendre encore quelques années. Mais, en tout état de cause la meilleure solution à tous égards est encore la biénergie : électricité en base pour alimenter les radiateurs à température basse ou moyenne et « effaçable à la demande », gaz pour compléter si une température d’eau élevée est requise et dans les situations où un effacement de l’électricité est souhaitable.


[1]
Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie, 5 juillet 2012 (mis à jour le 18 janvier 2016) – Bâtiment et ville durables, Le crédit d’impôt transition énergétique, http://www.developpement-durable.gouv.fr/Le-credit-d-impot-transition.html
[2] JORF n°0303 du 31 décembre 2015 page 25315 texte n° 106, Arrêté du 31 décembre 2015 pris pour l’application de l’article 200 quater du code général des impôts relatif au crédit d’impôts sur le revenu pour la transition énergétique, http://www.legifrance.gouv.fr/eli/arrete/2015/12/30/FCPE1531835A/jo/texte
[3] Cf. : Pour plus de détails se référer à la partie « pour les spécialistes »
[4] Hormis en maison individuelle neuve, où pratiquement 50% des parts de marché sont pris par les PAC.
[5] Dans ce cas : la Direction Générale de l’Énergie et du climat (DGEC) et l’Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Énergie (ADEME), établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC)
[6] Association Française pour les Pompes A Chaleurs (AFPAC),
[7] Batiactu, G.N., 29 juin 2016, La pompe à chaleur, une solution incontournable pour la transition énergétique ?, http://www.batiactu.com/edito/la-pompe-a-chaleur-une-solution-incontournable-pou-41607.php
[8] Ibid.
[9] Pas de date officielle, mais il est probable que la publication intervienne fin février
[10] Batiacti, G.N., 3 février 2016, Quelles évolutions réglementaires pour les PAC ?, http://www.batiactu.com/edito/quelles-evolutions-reglementaires-pac-43535.php?utm_source=news_actu&utm_medium=edito
[11] Martine Leclercq, Chargée de mission « chaleur renouvelable », Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Énergie, Direction Générale de l’Énergie et du Climat, Bureau économies d’énergie et chaleur renouvelable
[12] Côté Maison, Marianne Tournier, 18 mai 2012, Pompe à chaleur : choisir le bon système de chauffage, http://www.cotemaison.fr/energie-chauffage-climatisation/pac-bien-choisir-sa-pompe-a-chaleur-monobloc-ou-split_14419.html
[13] Programme d’accompagnement des professionnels, « Règle de l’Art Grenelle de l’Environnement 2012 », juin 2014, Pompes à chaleur double-service en habitat individuel conception et dimensionnement, installation et mise en service, entretien et maintenance, http://www.programmepacte.fr/sites/default/files/pdf/recommandation-pro-rage-pac-double-service-habitat-individuel-2014-06_0.pdf
[14] Association Promotelec, Dossiers Techniques, La PAC double service, http://www.promotelec.com/professionnels/dossiers-techniques/performance-energetique-environnementale/eau-chaude-thermodynamique-l-efficacite-rejoint-le-confort/2260-la-pac-double-service.html
[15] Guide technique de la chaudière, 19 août 2013, Chaudière hybride,
[16] Cette température extérieure de « basculement » est principalement défini actuellement par le seuil de performance des PAC (COP) quand il devient inférieur au « coefficient de transformation en énergie primaire », coefficient aujourd’hui fixé à 2,58)

PARTAGER CET ARTICLE