En poursuivant votre navigation, vous acceptez l'utilisation de cookies pour mesurer l'audience de notre site.
FERMER

Synthese atelier #2 : la ventilation des bâtiments tertiaires n’est pas régie par la RT

Par le |

Le 24 septembre, Jean Bergougnoux recevait trois spécialistes de la qualité de l’air intérieur afin d’identifier les pistes à proposer aux pouvoirs publics qui ne proposent qu’un guide à ce jour! Les propos de Madame Andrée Buchmann, Présidente de l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur sont ici repris dans cette video, filmée durant tout l’atelier organisé par EdEn.

La surveillance de la qualité de l’air intérieur devait devenir obligatoire dans certains lieux clos ouverts au public (loi portant engagement national pour l’environnement – article 180). Le décret 2011-1728 du 2 décembre 2011 relatif à la surveillance de la qualité de l’air intérieur dans certains établissements recevant du public prévoyait que la mise en œuvre de cette surveillance devait être effective avant le 1er janvier 2015. Mais Mme Ségolène Royal a décidé de la reporter sine die pour la remplacer par un guide.

Des chiffres qui démontrent l’importance du sujet

-19 milliards € /an, coût socio-économique des polluants de l’air intérieur, (cette somme concerne 6 polluants seulement : le benzène, le trichloréthylène, le radon, le monoxyde de carbone, les particules, la fumée de tabac environnementale)

-19 884 personnes/an, mortalité accélérée par les polluants de l’air intérieur, (Source : Etude exploratoire du coût socio-économique des polluants de l’air intérieur ANSES et OQAI- Avril 2014 –www.anses.fr)

Faut-il envisager la création d’un label pour préserver la qualité de l’air intérieur?

Les intervenants sont unanimes pour dire que la qualité de l’air intérieur est un enjeu de société majeur qu’il est urgent de prendre en considération. Seuls des obligations et contrôles systématiques, comme ils existent notamment pour les émissions de CO2 des chaudières, permettront de changer les comportements et obligeront l’ensemble des professionnels et les pouvoirs publics à s’investir dans cette problématique. Ainsi, un label environnemental en 2015 qui ne serait pas focalisé sur les problèmes énergétiques serait une bonne initiative.
Cependant, si des contrôles systématiques sont nécessaires, tous s’accordent sur le fait que la mise en place d’obligations uniformes, qui ne prennent pas en compte les contextes géographique et environnemental sont contre-productifs et absurdes. Il faut pouvoir faire des recommandations techniques en fonction des différents contextes car il n’existe pas de solution unique. Un effort pédagogique est également utile pour rappeler qu’il est nécessaire d’ouvrir les fenêtres lors des pics de pollution intérieurs et ne pas préconiser le contraire à la population. Avec le décret sur la surveillance de la qualité de l’air intérieur, trois substances étaient jugées prioritaires:

  • Le formaldéhyde, substance irritante pour le nez et les voies respiratoires, émise par certains matériaux de construction, le mobilier, certaines colles, les produits d’entretien… ; après avoir été d’abord considéré comme « cancérogène probable », le formaldéhyde a été classé comme « cancérogène certain » pour des expositions professionnelles par leCentre international de recherche sur le cancer(CIRC), qui dépend de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
  • Le benzène, substance cancérigène issue notamment de la combustion
  • Le dioxyde de carbone (CO2), dont les effets sanitaires se manifestent à des concentrations élevées, est représentatif du niveau de confinement des locaux.

L’état des moyens d’aération des bâtiments devait également être évalué. Quant aux décrets sur la qualité de l’air et la RT 2012 : aucune initiative de la maîtrise d’ouvrage ne peut corriger les incohérences en fonction des cas particuliers !

Le renouvellement de l’air intérieur des logements et des bâtiments tertiaires est un sujet qui met en jeu cinq critères :

  1. protection du bâti : lutte contre l’humidité et les moisissures
  2. santé des occupants : maintien d’un certain niveau de qualité de l’air intérieur
  3. économiques : maîtrise des coûts de la construction et des occupants
  4. énergétiques : consommation des ventilations et surtout du chauffage lié au renouvellement d’air
  5. confort : lutte contre les odeurs et le bruit au niveau des bouches d’aération et du moteur. Mais aussi l’hygrométrie, la température, l’éblouissement contribuent au confort

Malheureusement dans ce contexte multifactoriel, les dispositifs employés et les résultats obtenus évoluent en fonction du cadre réglementaire. C’est ainsi que les consommateurs et les maîtres d’ouvrage ne sont toujours pas autorisés à faire des compromis en fonction de l’environnement du bâti.

Depuis la création de la Ve République, les pouvoirs publics ont créé et imposé les concepts que nous utilisons encore aujourd’hui.

D’abord obligation d’aération des pièces dites techniques (1958), ensuite diffusion du concept de ventilation générale et permanente (1969), enfin généralisation du concept de ventilation contrôlée et de débit minimum (1982-1983).

Pour les logements, les fameux arrêtés de 24 mars 1982 et du 28 octobre 1983 sont toujours en vigueur respectivement 32 ans et 31 ans après leur promulgation. Depuis les quatre réglementations thermiques (RT) successives se sont appuyées sur ce seul cadre pour faire évoluer les installations de VMC. Depuis plus de trente ans, c’est le critère énergétique – comme l’appellation « RT » l’indique – qui est privilégié en matière de ventilation, en parallèle bien sûr du critère économique du coût de la construction.

La cohérence administrative n’est pas de mise, notamment avec les bâtiments tertiaires! La ventilation des bâtiments tertiaires n’est pas régie par les réglementations thermiques mais par le Code du travail pour les locaux dits à « pollution non spécifique » en particulier les bureaux, et par la réglementation sanitaire (RSDT) départementale d’hygiène et de sécurité, en particulier les locaux d’enseignement. D’autres contradictions apparaissent parfois. Par exemple le Code du travail impose 25m3/heure pour un enseignant alors que le RSDT impose 18m3/heure pour un élève en lycée ?

Pour Andrée Buchmann, il ne faut pas s’enfermer dans des normes qui ne répondent pas à la diversité des situations :

  • la RT2012 devrait prendre en compte la zone géographique pour imposer, ou non, des aérations ou des systèmes de ventilation ! Il faut une approche nuancée et beaucoup de réflexions avant de choisir le meilleur moyen de renouveler l’air d’un bâti
  • la ventilation mécanique peut se justifier dans les lieux publics. Mais dans les bâtiments résidentiels, il faut étudier l’environnement du bâti
  • il ne faudrait pas se focaliser sur la simple baisse de consommations d’énergie mais aussi améliorer la qualité de vie lors d’une dégradation générale du bâtiment à rénover
  • la systématisation des poses de ventilation mécanique dans la construction neuve est très couteuse pour un résultat très décevant ! Elles sont souvent mal installées, elles ne filtrent pas les impuretés de l’air. Personne ne vérifie leur bon fonctionnement. De plus, dans les immeubles collectifs, il est habituel de voir des occupants, boucher les conduits à cause des nuisances sonores ou d’une mauvaise température ; Ainsi, le principe d’analyse de l’air des salles de classes de petits enfants serait un bon début avant de le généraliser.

PARTAGER CET ARTICLE